Lettre d’amour aux chaussures de marche
Les chaussures rendent possible l’ascension des rêves.
Chère chaussures,
Vous, mon ancrage au sol et mon indispensable à chaque départ. Vous avec qui commence tout voyage, par le petit pas en avant bien chaussé dans ta semelle épaisse. Vous,les premières à toujours toucher le sol du nouveau pays à visiter, à quitter le pas de la porte du foyer à laisser… Vous qui m’avez aidé à changer de pays pour changer d’âme…
Un tout petit pas aussi simple et banal que mettre un pied devant l’autre, un petit pas à l’échelle de l’Humanité, un grand pas à mon échelle humaine : l’impulsion d’une découverte sur le monde, sur soi…
Mes adorées chaussures, on ne vous regarde jamais vraiment sauf si vos talons de 10 centimètres commencent à nous entailler la chair. Il est vrai qu’on ne vos prête que peu attention du moment qu’on est confort et au sec ou au chaud selon les saisons…
Ce matin je vous ai regardé, chères chaussures de marche, je crois que je vous ai vues pour la première fois consciemment. Ces chaussures défoncées mais pas encore à bout de souffle, ces chaussures délavées mais vivantes d’expériences, ces chaussures banales qui accompagnent les moments les plus inspirants de ma vie…

Vous commencez à vieillir, la mousse apparait sur les contreforts, les lacets sont délavés… Vous êtes encore crottées, pas lavées et loin de briller… Mais ça c’est plutôt ma faute à moi ! Car, même trouées,vous continuez à coudre ma réalité de rêves réalisés. Plus vraiment étanches, vous me protégez pourtant du froid et de l’humidité.
Sales vous êtes pour sûre ! Mais vous retenez encore les souvenirs boueux de la jungle sur les lacets, les miettes de tortillas, de baguettes et de chapati, la poussière du Népal, les reflets de l’Everest observé, l’odeur de l’aventure qui prend parfois à la gorge…
Vous m’en avez fait faire, tellement, des premiers pas. C’est maman qui vous a achetées pour mon départ en Irlande il y a 6 ans. Vous m’avez suivi partout en Amérique Centrale, foulant le sol de l’Honduras, grimpant les pyramides maya mexicaines, m’emmenant sur les traces du site archéologique d’El Mirador après 5 jours de trek dans la jungle du Guatemala, me montant au sommet du volcan Acatanango à 4000 mètres d’altitude, se remplissant de sables sur les plages des îles désertes accostées au Bélize.

Vous êtes toujours là dans le Sud de la France quand je vais chercher les champignons, vous êtes encore à mes pieds en Irlande pour les balades dominicales sur les crêtes des falaises face à l’atlantique et piétiner la ville de Limerick, vous me faîtes avancer en Corse dans les randos sur les traces du G20, en Lithuanie pour aller jusqu’à la frontière russe, au Danemark pour fouler le sol de Christiannia, en Croatie me rassurant quand l’appréhension grandit dans le voyage solitaire, enfin, vous prenez toujours soin de mes pieds en Inde, puis au Pérou et dans les profondeurs de la mine de Potossi en Bolivie.
Voilà ce que j’ai vu, la tonne de souvenirs déferlant de mes pieds à mon esprit me rappelant une petite partie des incroyables aventures partagées, chaussette à semelle, avec vous !
J’aimerais vous garder à jamais, mais rien n’est permanent dans cette réalité. Je sais qu’au retour de ce troisième séjour indien, une nouvelle paire m’attendra dans le foyer quitté, souvent, grâce au premier petit pas à l’extérieur. Le même modèle car…
On ne change pas une équipe qui gagne pour repartir à l’ascension de mes rêves !
Chères chaussures, je vous aime